ROCOCO JAPONAIS
O toi dont l'oeil est noir, les tresses noires,
les chairs blondes, écoute-moi, ô ma folâtre
louve !
J'aime tes yeux fantasques, tes yeux qui se
retroussent sur les tempes ; j'aime ta bouche
rouge comme une baie de sorbier, tes joues
rondes et jaunes ; j'aime tes pieds tors, ta
gorge roide, tes grands ongles lancéolés,
brillants comme des valves de nacre.
J'aime, ô mignarde louve, ton énervant
nonchaloir, ton sourire alangui, ton attitude
indolente, tes gestes mièvres.
J'aime, ô louve câline, les miaulements de ta
voix, j'aime ses tons ululants et rauques, mais
j'aime par-dessus tout, j'aime à en mourir, ton
nez, ton petit nez qui s'échappe des vagues de
ta chevelure, comme une rose jaune éclose dans
un feuillage noir.
CAMAIEU ROUGE
La chambre était tendue de satin rose broché de
ramages cramoisis, les rideaux tombaient
amplement des fenêtres, cassant sur un tapis à
fleurs de pourpre leurs grands plis de velours
grenat. Aux murs étaient appendus des sanguines
de Boucher et des plats ronds en cuivre
fleuronnés et niellés par un artiste de la
Renaissance.
Le divan, les fauteuils, les chaises, étaient
couverts d'étoffe pareille aux tentures, avec
crépines incarnates, et sur la cheminée que
surmontait une glace sans tain, découvrant un
ciel d'automne tout empourpré par un soleil
couchant et des forêts aux feuillages lie de
vin, s'épanouissait, dans une vaste jardinière,
un énorme bouquet d'azaléas carminées, de
sauges, de digitales et d'amarantes.
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