Les contraintes
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Dossier légal des Fleurs du Mal [NOTES ET DOCUMENTS. POUR MON AVOCAT) Le livre doit être jugé dans son ensemble, et alors il en ressort une terrible moralité. Donc je n'ai pas à me louer de cette singulière indulgence qui n'incrimine que 13 morceaux sur 100. Cette indulgence m'est très funeste. C'est en pensant à ce parfait ensemble de mon livre, que je disais à M. le Juge d'instruction : mon unique tort a été de compter sur l'intelligence universelle, et ne pas faire une préface où j'aurais posé mes principes littéraires et dégagé la question si importante de la Morale. (Voir, à propos de la Morale dans les œuvres d'art, les remarquables lettres de M. Honoré de Balzac à M. Hippolyte Castille, dans le journal la Semaine 1.)
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A Propos des Petits Poèmes en Prose A ARSENE LA HOUSSAYE Mon cher ami, je vous envoie un petit ouvrage dont on ne pourrait pas dire, sans injustice, qu'il n'a ni queue ni tête, puisque tout, au contraire, y est à la fois tête et queue, alternativement et réciproquement. Considérez, je vous prie, quelles admirables commodités cette combinaison nous offre à tous, à vous, à moi et au lecteur. Nous pouvons couper où nous voulons, moi ma rêverie, vous le manuscrit, le lecteur sa lecture; car je ne suspends pas la volonté rétive de celui-ci au fil interminable d'une intrigue superflue. Enlevez une vertèbre, et les deux morceaux de cette tortueuse fantaisie se rejoindront sans peine. Hachez-la en nombreux fragments, et vous verrez que chacun peut exister à part. Dans l'espérance que quelques-uns de ces tronçons seront assez vivants pour vous plaire et vous amuser, j'ose vous dédier le serpent tout entier.
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LE JUGEMENT des Fleurs du Mal
Gazette des Tribunaux, 21 août 1857 : En ce qui touche le délit d'offense à la morale religieuse : Attendu que la prévention n'est pas établie, renvoie les prévenus des fins des poursuites; En ce qui-touche la prévention d'offense à la morale publique et aux bonnes mœurs : Attendu que l'erreur du poète, dans le but qu'il voulait atteindre et dans la route qu'il a suivie, quelque effort de style qu'il ait pu faire, quel que soit le blâme qui précède ou qui suit ses peintures, ne saurait détruire l'effet funeste des tableaux qu'il présente au lecteur, et qui, dans les pièces incriminées, conduisent nécessairement à l'excitation des sens par un réalisme grossier et offensant pour la pudeur; Attendu que Baudelaire; Poulet-Malassis et Debroise ont commis le délit d'outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs, savoir : Baudelaire, en publiant; Poulet-Malassis en publiant, vendant et mettant en vente, à Paris et à Alençon, l'ouvrage intitulé : les Fleurs du Mal, lequel contient des passages ou expressions obscènes et immorales; Que lesdits passages sont contenus dans les pièces portant les numéros 20, 30, 39, 80, 8i et 87 du recueil; Vu l'article 8 de la loi du 17 mai 1829, l'article 26 de la loi du 26 mai 1819; Vu également l'article 463 du Code pénal; Condamne Baudelaire à 300 fr. d'amende, Poulet-Malassis et Debroise chacun à 100 fr. d'amende; Ordonne la suppression des pièces portant les nos 20, 30, 39, 80, 81 et 87 du recueil, Et condamne les prévenus solidairement aux frais. Les Bijoux, Le Léthé, A celle qui est. trop gaie, Lesbos. Femmes damnées (A la pâle clarté des lampes languissantes...), Les Métamorphoses du. Vampire.
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de lecture des
Fleurs du Mal
et des
Petits Poèmes
en Prose
de Baudelaire
et les actes du
jugement